La faute de son père, bien sûr, si j'ai eu un garçon.
Le 8 mars, je ne peux pas écrire de lettre à ma fille comme beaucoup de femmes l’ont fait, sur Twitter ou LinkedIn, dans un mélange de candeur, sincérité, et personal branling pour celles dont je soupçonne l’opportunisme (même si la prose, voire la poésie, était belle, il faut l’admettre).
Mais pourquoi se limiter à écrire à nos filles ? Si nous voulons que les futures générations règlent ce problème, c’est tout autant aux garçons qu’il faut s’adresser… sinon plus ?
Mon fils, Petit d’Homme, donc, pour les intimes, voit le monde à l’aune de sa vie à lui, comme tous les enfants. Il était donc très étonné quand il a lu dans un de ses Cabanes magiques qu’il fut un temps où on n’enseignait pas la lecture aux filles. Sa réaction exacte a même été « mais c’est débile, maman ! » si je me souviens bien.
Mais le temps passe, il grandit, il est confronté au monde extérieur qui n’a pas l’ouverture d’esprit de Cher-et-Tendre. À des schémas familiaux différents dans le partage des tâches du nôtre. Alors il fallait que j’écrive une lettre à mon fils.
Lettre à mon fils
Mon petit d’homme, mon fils, ma vie.
Si tu relis ou ré-écoutes un jour ces mots, quand tu seras un homme, peut-être t’étonneras-tu que j’ai souhaité te rappeler des fondamentaux de ton époque. Ou peut-être te féliciteras-tu que ta mère, et sa mère avant elle, avaient déjà lancé les combats qui occupent encore ton temps. Je ne sais pas. Ma propre mère était déjà féministe à ma naissance, il y a bientôt 48 ans. Et si les choses ont progressé sur pas mal de sujets, on ne peut pas encore s’en satisfaire. Donc peut-être que dans 20 ou 30 ans, il restera encore du boulot pour ta génération.
Mais les messages que tu dois entendre dès aujourd’hui, c’est que tout est possible, pour une fille comme pour un garçon. Tu peux devenir sage-femme, ou pompier, ou chef d’entreprise, ou coiffeur·se, ou quoi que ce soit que tu aies envie de faire. Comme tes copines de classe. Ni plus. Ni moins.
Ce que tu dois entendre dès aujourd’hui, c’est que les tâches ménagères ne sont pas le seul domaine des femmes. Qu’un homme met ou débarrasse la table, repasse, fait la cuisine, change des couches, ou console son enfant aussi bien qu’une femme. Et qu’une femme peut gagner plus que l’homme avec qui elle partage sa vie sans que cela ne soit un problème. Ni pour lui, ni pour elle, ni pour ceux qui les entourent.
Ce que tu dois comprendre dès maintenant, c’est que la force physique supérieure de l’homme dans de nombreux cas ne doit pas, ne peut pas être un blanc-seing pour gagner. Et ne doit jamais au grand jamais être utilisé contre un autre être humain, surtout s’il·elle est moins fort·e que toi.
Ce que tu dois comprendre dès maintenant, c’est que d’autres ne penseront pas comme toi. D’autres garçons, probablement, mais pas forcément. Ils feront des blagues pas drôles. Ils auront des gestes déplacés. Ils se comporteront mal avec les filles ou avec les garçons qui aiment les garçons, ou qui aiment les filles et les garçons. Et ils t’encourageront à les imiter. Ou te donneront envie de les imiter parce qu’ils auront l’air d’être grands, forts, en groupe.
Ne le rejoins pas. Ne les imite pas. Jamais. Ils ne sont ni grands, ni forts, ni en groupe. C’est parce qu’ils sont faibles qu’ils cherchent à exister. C’est parce qu’ils sont petits qu’ils cherchent à se grandir en marchant sur les autres. C’est parce qu’ils sont seuls qu’ils cherchent à se rassurer.
Ne perd jamais ce sens de l’équité qui t’habite depuis ta plus tendre enfance. Continue de t’indigner des injustices. Insiste auprès de ceux qui disent que les filles ne savent pas conduire – compter – jouer au foot – tenir une brigade de restaurant pour leur demander pourquoi ils pensent cela. Pour leur citer des exemples précis (ta mère par exemple, en tout cas pour conduire et compter, pas pour le foot ou la cuisine – mais d’autres aussi). Rappelle-leur que leur mère, leur grand-mère, leur soeur, sont des femmes aussi.
Tu seras un homme, mon fils. Alors sois un homme bien.

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