Confinés dehors

La France coupée en deux, aussi.

Certains de mes lecteurs et/ou auditeurs fidèles se sont étonnés que j’ai choisi dimanche de publier un article pro et de ne pas commenter le confinement en extérieur sur un tiers du pays. Ils·elles se sont même demandé si c’était parce que je n’étais pas (encore) concernée dans ma belle ville de Bordeaux.

Que nenni. C’est juste que c’est compliqué dans ma tête en fait.

Ce n’est pas un échec

C’est juste que ça n’a pas marché. À nouveau. Après, on peut pas leur en vouloir, on n’a aucune expérience, on teste des trucs, ça marche ou ça marche pas, et quand ça marche pas, on change. En start-up on appelle ça le « Fail Fast« . Mais il y a le mot « fail » dedans, alors le gouvernement il n’aime pas.

On peut pas leur en vouloir de ça non plus. Avec les 65 millions d’épidémiologistes en puissance, l’opposition en embuscade qui sait beaucoup mieux ce qui aurait marché – et qui ne prend aucun risque puisqu’on n’aura jamais les moyens de vérifier leurs dires, et les informations scientifiques toujours autant parcellaires et oscillantes, les institutions ne peuvent pas avouer d’échec.

Mon avis ? Ce ne sont pas tant les mesures qui sont un échec que leur exécution dans le mille-feuille administratif. C’est en fait l’échec du modèle français centralisé, administratif, sans méritocratie, des petits chefs à la sécurité de l’emploi, et déconnecté de la société civile. Ce modèle même qui était censé changer sous l’impulsion du président actuel.

Ça va durer encore longtemps ?

Avec un virus qui a plus d’énergie qu’une pile Duracell, on en prend à mon avis encore pour quelques mois, surtout que la valse des vaccins n’arrête pas, et devient à mille temps. Entre problèmes d’approvisionnement, pas de deux sur les effets secondaires, logistique de stockage, et volte-faces sur les âges d’administration de chaque cru, on n’est pas prêts d’être vaccinés avec Cher-et-Tendre. J’avais un temps espéré demander à notre pharmacie de nous appeler si jamais un soir il leur restait des doses de AstraZeneca à utiliser, mais la dernière recommandation de la Haute Autorité de Santé (réserver le AZ au plus de 55 ans, pour ceux qui n’ont pas suivi) ne me permet pas d’essayer.

Donc vu qu’on nous annonce fin de l’été pour notre classe d’âges (les moins de 50 ans sans problème particulier), je table sur Novembre. Enfin j’espère. Parce que j’aimerai bien prendre l’avion en Décembre, et que j’ai peur que ça ne soit un passage obligé pour voyager, ce vaccin. Deux ans sans voyager, ça fait déjà long, ça m’embêterait d’attendre plus.

Mais quelles alternatives ?

Alors bien sûr, on peut hurler avec les loups que c’est une honte, un scandale, une injure au statut de la France qui se doit d’être meilleure. On peut clamer haut et fort qu’il fallait faire différemment (et que si les Français avaient voté pour le·la clameur·euse, alors les choses eussent été différentes, invérifiable, ça mange pas de pain). On peut râler, résister, ne pas respecter les consignes, dire que c’est confusant, mais au fond, qu’est-ce qu’on peut faire ?

Dieu, donne-nous la grâce
d’accepter avec sérénité
les choses qui ne peuvent être changées,
le courage de changer celles qui devraient l’être,
et la sagesse de les distinguer l’une de l’autre (variante : d’en connaître la différence).

Prière de la sérénité

Chez mes parents, pendant longtemps, il y avait un petit cadre avec cette prière dite de la sérénité (en anglais). Depuis toute petite, feu mon papa m’a rappelé l’importance d’accepter ce qu’on ne peut pas changer, même si il a essayé de changer beaucoup de choses – qu’il pensait pouvoir changer, avec courage. Elle est devenue un incontournable par exemple des réunions des Alcooliques Anonymes. Vous la connaissez sûrement, comme beaucoup de monde. Mais qui l’applique réellement aujourd’hui ?

Le pouvoir de changer les choses

En fait, de plus en plus de monde pensent que de plus en plus de choses peuvent (et doivent) changer. Et je pense qu’ils ont raison : on n’a jamais autant eu la possibilité de faire bouger les choses. Les mentalités, d’abord, contre le racisme, le sexisme, l’antisémitisme, et tous les autres -ismes possibles. De grands mouvements mondiaux sont nés d’un battement de papillons, et on balance à tout-va dans un grand élan de courage pour faire changer les choses.

Mais plus ne veut pas dire tout. Et en particulier on ne peut pas revenir en arrière, quand on souhaite changer. On ne peut que regarder de l’avant. Alors j’en ai assez de toutes les grandes gueules qui viennent nous expliquer à longueur de plateau télé ou radio qu’il aurait fallu faire des trucs il y a 2 ans, 5 ans, 10 ans et que c’est de la faute du passé si on a obéré notre avenir. Je me fous de si ils·elles ont raison ou pas, d’ailleurs, parce que là n’est pas la question. Il faut regarder devant.

C’est ça le vrai courage.

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