Petits bonheurs et grand coup de gueule

I can't talk right now, I'm doing feminist shit

Vous connaissez ce sentiment qui fait que parfois les planètes s’alignent et que vous avez l’impression que ça va pas trop mal finalement ? On se sent comme sur un nuage sans trop savoir ce qu’on a fait récemment pour mériter ça (syndrome de l’imposteur, je te vois venir…).

Et puis on entend une info qui nous révolte et on se dit qu’on n’a pas le droit d’être heureux quand tant d’injustice subsiste.

Perte de droit parental

Le matin, je lis plein de newsletters avec mon café, puis j’écoute France Info dans la salle de bains. C’est une habitude que je tiens de feu mon Papa, on ne se refait pas.

Hier matin, donc, c’est ce que j’ai fait. Et j’ai failli tomber sous la douche.

Pourtant, j’étais de bonne humeur. Épuisée toujours, ça ne s’arrange pas, mais de bonne humeur. Les planètes ont l’air de s’aligner pas trop mal, j’ai eu pas mal de bonnes nouvelles professionnelles ces derniers temps, je venais de passer un week-end à Paris en touriste complet, entre expo Boticelli et théâtre Edouard VII, bref, ça allait.

Après la commission Sauvé et son CIASE, on parlait de la commission CIIVISE, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants.

Dans son premier avis paru hier, la Ciivise recommande entre autres de ne pas poursuivre le parent qui ne respecterait le droit de visite de l’autre parent visé par une enquête pour inceste, et de suspendre, pendant le temps de l’investigation, le droit de visite et l’exercice du droit parental de ce parent soupçonné.

Vous voyez où je veux en venir ?

Si la commission le recommande, c’est que ce n’est pas encore le cas.

Ça veut dire qu’une mère qui soupçonne son (souvent) ex-conjoint d’inceste sur leur enfant commun et porte plainte à ce sujet doit continuer à ce jour à lui déposer l’enfant selon les dates imposées par le jugement de garde. Et qu’elle s’expose à des poursuites si elle ne le fait pas.

En creusant un peu le sujet, j’ai découvert en fait toute une panoplie de biais qui diminuent la portée des paroles, non seulement des mères, mais également des enfants dans le cadre d’une procédure de séparation. En gros, pour toutes les institutions qui sont censées écouter et accompagner les victimes (les enfants, donc), le premier réflexe est de soupçonner la mère d’avoir fait dire des choses à son enfant pour gagner la garde.

Un cas pour combien ?

Ça a dû arriver ce genre de cas. Peut-être. Mais ne pas protéger l’enfant, ne pas accompagner sa mère dans ses démarches pour protéger son enfant, nier la parole des victimes – dont on sait qu’elle peut être difficile à formuler, c’est tout simplement monstrueux.

Je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est parce que ce sont dans la (très) grande majorité des cas des mères qui essaient de protéger leurs enfants de leurs pères, donc les hommes les accusés, qu’on en est arrivé là. Le bon vieux cliché macho de l’ex-femme vengeresse et hystérique.

Je vous livre un exemple qui m’a fait bondir :

Une immense majorité des témoignages qui nous ont été transmis font état de ce même mécanisme: en dépit des révélations de l’enfant, ce n’est pas le père qui est mis en cause, mais la mère, accusée de manipuler son enfant

Rapport de la CIIVISE

On est encore loin de l’égalité et la parité, non ?

C’est épuisant ces double-standards. C’est révoltant cette façon dont les institutions dévalorisent la parole non seulement de la femme, mais de l’enfant. C’est inquiétant aussi, d’ailleurs, même si au fond, ça n’est pas étonnant, finalement. C’est triste.

Il reste tellement à faire

Dans quel monde vit Petit d’Homme ? Comment continuer de lui expliquer que les femmes et les hommes naissent libres et égaux en droits quand il y a tant d’exemples du contraire ? Combien de lettres je vais devoir lui écrire pour lui expliquer que même si le monde ne tourne pas rond, on n’est pas obligé de tourner avec lui ?

C’est un rocher de Sisyphe. Un tonneau des Danaïdes. Une besogne éternelle. Mais ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas le faire.

Juste qu’on doit s’y mettre toutes et tous ensemble si on veut avoir une chance de dépasser ce patriarcat malsain.

Pendant ce temps

Bon, de toutes façons, je vais pas pouvoir lui en parler tout de suite, à Petit d’Homme, puisqu’il est chez ses grands-parents en Belgique pour les vacances scolaires. Parce que c’est les vacances scolaires.

Vous savez, ce moment où les mères qui ont la garde doivent remettre le enfants à leur père ?

Photo by Gayatri Malhotra on Unsplash


Pour vous abonner au podcast

Revues (et Corrigées) est disponible sur Apple PodcastsGoogle PodcastsSpotifyRadio PublicBreakerPocket Cast, Overcast, Anchor, Bullhorn, Podcloud et Podcast Addict

Si vous appréciez lire ce blog ou écouter le podcast, vous pouvez m’offrir un café ou une coupe de champagne. Et laissez moi un message quand vous le faites, que je puisse vous inviter à en boire un vrai en terrasse !